1. Qu’est-ce qu’une dissertation?

En dépit des préjugés, l’épreuve de français requiert une compétence facile à déterminer. Elle exige une maîtrise technique des règles de la dissertation ainsi qu’une bonne connaissance des textes au programme. Les conseils suivants vous permettront de vous préparer rationnellement.

 Le jour de la dissertation

Il faudra aller vite et les candidats qui se seront exercés à identifier les convergences et les divergences entre les textes auront pris de l’avance sur les autres. Dès que vous aurez le sujet devant les yeux, vous vous appliquerez à:

• Dégager une problématique avec rapidité pour orienter la recherche des idées en fonction de cet axe dominant.

• Tracer au brouillon les grandes lignes du développement.

• Nourrir votre réflexion en citant les différents auteurs et en équilibrant les références aux uns et aux autres : il serait peu habile de consacrer les deux tiers d’une partie à une oeuvre et de sacrifier les deux autres.

• Minuter votre temps pour éviter d’être pris de court : aucun brouillon n’est accepté. Il faudrait vous habituer à travailler en conséquence mais progressivement et pas forcément dès le début de votre préparation — si non, vous risquez de produire des analyses superficielles faute de temps pour creuser la réflexion. Diminuez votre temps de préparation en fonction de vos propres acquisitions; vous travaillerez alors de plus en plus vite.

2. Les bases d’une bonne dissertation : comment problématiser “énoncé du sujet?

Sans problématique, pas de dissertation

Une dissertation qui n’examine pas la problématique soulevée par l’énoncé n’est pas digne de ce nom : elle n’obtiendra pas la moyenne. Aux concours scientifiques, les rapports de jurys déplorent l’inaptitude des candidats à identifier une problématique claire et à la traiter avec rigueur, autrement dit à adopter une démarche progressive et à justifier ses arguments par des références précises aux oeuvres au programme. Il faut le dire avec netteté, une dissertation ne peut se réduire à une récitation du cours. Elle exige une mise en perspective des oeuvres au programme les unes par rapport aux autres mais aussi à l’énoncé du sujet.

Les impératifs à respecter pour poser le bon problème

La problématique se déduit de la mise en perspective de la thèse émise par l’auteur dont l’énoncé vous soumet la citation et des trois oeuvres au programme. Il faut exclure toute généralité même dans l’introduction — surtout dans l’introduction — car la spécificité de l’épreuve de français consiste à inviter les étudiants à formuler une difficulté précise, dans le contexte du programme.

N’admettez pas, d’emblée, l’opinion émise dans l’énoncé puisque vous devez la discuter avec précision et objectivité. Il faut, au contraire, souligner, le cas échéant, le caractère paradoxal de la thèse émise par tel ou tel auteur — surtout ne dites pas : nous allons donc examiner dans quelle mesure les oeuvres au programme confirment... Votre correcteur attend de vous une réflexion critique, pas un assentiment immédiat; même si vous devez conclure à la convergence entre la thèse énoncée par l’auteur et les oeuvres au programme, vous aurez à la prouver tout au long de votre démonstration. Un scientifique doit savoir qu’on ne peut affirmer que les conclusions d’une argumentation objective.

Soyez attentif à bien centrer votre problématique: posez une question bien précise, qui ne saurait être utilisée dans un autre devoir — ce qui exclut, d’emblée, les formulations du genre : qu’en est-il dans les oeuvres au programme ? Ou qu’en penser au regard des textes au programme ? Pour être sûr de bien centrer la problématique, lisez votre question et demandez-vous si elle pourrait être utilisée dans un autre contexte ; si la réponse est affirmative, recommencez.

Ne répondez pas dès l’introduction à la question posée dans l’énoncé. Attendez la conclusion pour apporter, éventuellement, une réponse à la problématique — ou signaler la difficulté à la trouver.

Tenez compte des consignes qui vous seront données. Précisez vos objectifs, annoncez clairement votre plan et insistez sur la finalité de votre démonstration.

Résumons-nous

Pour problématiser l’énoncé, il convient de comprendre quelle question traite l’auteur — clans le cadre de l’épreuve de dissertation, rien de plus facile puisqu’il s’agit de traiter le thème au programme ; mais il vous restera à comprendre dans quel contexte conceptuel l’énoncé doit être analysé.

Quelle réponse (ou thèse) il lui donne — il faut donc dégager la thèse de l’auteur et comprendre pourquoi il émet ce point de vue, autrement dit identifier ses postulats.

Cette thèse fait problème par rapport aux textes au programme : la connaissance de ces oeuvres vous permet de poser le bon problème.

Le plan de votre démonstration découle de la problématique que vous venez d’identifier : vous revient d’examiner la validité (plan dialectique), ou l’exhaustivité (plan développé) ou tous les aspects (plan thématique), de la thèse. voir fiche méthode de la dissertation

3. Les quatre points d’une introduction réussie

1er point. Énoncé de la question abordée dans l’énoncé.

2 point. Formulation de la réponse apportée par l’auteur cité, ou suggérée par l’énonce du sujet.

3e point. Confrontation du 1er et du 2 point pour poser le problème en référence aux oeuvres au programme seulement.

4e point. Annonce du plan qui en découle. Évitez de formuler cette présentation en utilisant des tournures très lourdes, du genre: dans une première partie, nous verrons que... puis dans une deuxième partie, etc. Essayez de formuler l’essentiel de votre démonstration en une seule phrase — ce qui constitue un bon test pour en vérifier la consistance et la validité.

4. La construction du développement

Le plan de la dissertation se déduit de la nature de la thèse formulée dans l’énoncé. En effet, le problème à traiter dépend de la validité de la thèse énoncée dans le sujet.

Ne vous contentez pas de deux parties; il convient de mettre en perspective l’analyse (ou le développement de la thèse) et sa critique pour, dans une troisième partie, préciser vos propos et en retirer un enseignement.

Les trois grands types de plans

Plusieurs cas de figure peuvent se présenter en fonction de la nature du problème à soulever.

1er cas : le sujet paradoxal et le plan dialectique:

S’il est possible de réfuter la thèse et de lui opposer un avis contraire, vous pourrez adopter le rôle du défenseur puis du contradicteur de la thèse. Vous construirez alors un plan dialectique: 1 analyse de la thèse — 2 contradiction - 3 conciliation des perspectives (évitez les réponses « oui et non ») Voir exemple de dissertation rédigée suivant ce type de plan: le langage dans la société

2e cas: le sujet à portée partielle et le plan développé:

Si la thèse se vérifie seulement en partie, on a un sujet à portée partielle ; dans ce cas, vous en montrerez les limites et vous compléterez l’analyse en l’élargissant le cas échéant. Vous suivrez un plan développé : 1-confirmation de la thèse dans son domaine d’application— 2- ouverture vers d’autres aspects du problème — 3 redéfinition de la thèse. Voir un exemple: " comment peut-on à la fois croire et savoir?"

3e cas : le sujet thématique et le plan analytique:

Si la thèse suggère une investigation de ses diverses applications, on a un sujet thématique et un plan analytique ; vous devez décliner et illustrer par l’exemple les différentes applications possibles de la thèse. Voir un exemple : "celui qui ne croit pas"

Dans certains cas (les plus nombreux en fait), le sujet présente un caractère hybride : à vous d’apprécier la démarche à suivre en conjuguant différents modes d’argumentation.

Les impératifs à respecter pour réussir le plan

Excluez totalement les plans qui consistent à opposer un auteur à un autre. Ce type de démarche s’avère illégitime: il faut souligner les divergences entre les auteurs sur toutes les idées que vous avancez concernant le problème à traiter ; il ne se dissocie pas de votre appréciation de ses données, que vous devez identifier dans les textes à étudier.

Dans chaque partie de la dissertation prise isolément, il ne faut pas non plus juxtaposer les analyses des trois oeuvres envisagées l’une après l’autre. Vous n’êtes pas censé produire des analyses séparées des oeuvres mais partir des idées que vous voulez développer à partir de la difficulté soulevée par l’énoncé et de votre approche des oeuvres au programme.

La progression logique à l’intérieur de chaque partie

La confrontation des textes au programme est impérative : dans chaque partie de la démonstration, il faut absolument mettre en perspective tous les textes au programme. Il est inutile de citer d’autres auteurs — sauf de manière tout à fait incidente. Veillez à bien souligner l’originalité des auteurs étudiés — ce que vous ne pouvez faire qu’en maîtrisant les trois textes au programme.

La confrontation des auteurs doit être maximale : essayez de mettre le plus souvent en perspective les oeuvres les unes par rapport aux autres. Dans l’idéal, il faudrait construire un plan en trois parties et trois sous-parties ; si vous le pouvez, n’hésitez pas à confronter les points de vue à chaque fois que vous formulez un argument.

Ne tombez pas dans le psychologisme : n’essayez pas de rapporter les impressions produites sur vous par les personnages ; on ne vous demande pas de développements subjectifs mais des analyses fondées sur des arguments.

Ne racontez pas les oeuvres : le correcteur attend de vous que vous maniiez des concepts et non que vous décriviez des oeuvres ou des situations dont il a déjà pris connaissance.

La bonne utilisation des références passe par une connaissance précise, donc approfondie, des oeuvres étudiées ; elle permet de bâtir une progression logique vraiment pertinente et surtout personnelle. Ne perdez pas de temps à apprendre des citations par coeur ; mieux vaut se référer avec clarté à des passages des oeuvres dont vous tirerez le meilleur profit en les commentant avec précision. Ne restez pas dans l’allusion et n’assénez pas d’exemples sans les commenter.

Rappelez-vous qu’une citation ne prouve rien, en soi, mais qu’il convient de la commenter pour mettre en évidence le lien à faire entre votre idée et celle d’un auteur. Surtout n’accumulez pas les citations les unes après les autres: on ne vous demande pas de produire un catalogue mais d’organiser une réflexion abstraite avant de recourir aux textes. Ne vous laissez pas déborder par vos références aux textes : elles ne doivent pas orienter votre devoir. Vous seul devez en conserver la maîtrise.

La pertinence du raisonnement doit s’accompagner d’une réflexion originale : ne reprenez pas une question de cours ou les analyses critiques qui font référence sur le programme. Votre correcteur appréciera que vous preniez quelques risques en vous fondant sur une appréciation rigoureuse et nuancée des enjeux communs, des convergences et des divergences des oeuvres étudiées.

Veillez à ménager des transitions bien claires entre les différentes parties du plan. À la fin de chaque parti, faites une synthèse des idées que vous venez d’énoncer et montrez que vous allez passer à un nouvel examen critique des notions. Pour ce faire, procédez en deux temps: donnez une conclusion partielle en fin de chaque phase du raisonnement puis amorcez l’étape suivante en utilisant des « outils » grammaticaux, pour introduire une opposition (« mais ») ou un changement de perspective ( « par ailleurs ») ou un complément d’analyse ( « en outre »), etc.

Ne tombez pas dans des développements verbeux. Dans certaines écoles, on demande un nombre de pages maximal— le plus souvent de l’ordre de trois pages.

5. Les éléments d’une bonne conclusion

Au terme de la réflexion, la conclusion apporte un jugement nuancé au problème soulevé en introduction. Commencez par reprendre l’essentiel de vos synthèses partielles et montrez que vous avez tenté d’éclairer la difficulté sous différents angles.

La prise de position:

Procédez un rapide récapitulatif de vos analyses de manière à apprécier s’il est possible ou non de répondre à la question posée en introduction. Ne vous satisfaites pas d’une opposition simple du pour et du contre : à quel vous servirait, en effet, d’avoir disserté sur plusieurs pages pour rester dans l’expectative? voir les règles d'une bonne dissertation

Remarque. Il n’est pas vraiment utile « d’ouvrir» les perspectives sur un nouveau questionnement; ce prétendu élargissement des perspectives équivaut, très souvent, à un aveu inconscient des limites de votre propre analyse. De toutes les manières, une dissertation constitue un exercice formel ; elle ne suffit pas à épuiser des questions morales et existentielles; c’est un exercice qu’il vaut mieux traiter dans ses limites et refermer sur lui-même en le dotant d’une cohérence interne.